Comment offrir aux internes de gynécologie-obstétrique une formation chirurgicale de qualité alors même que le nombre de « chirurgies simples » diminuent par augmentation de recrutements complexes dans les centres experts, que le temps qui y est dédié est réduit avec la pression sur l’optimisation du nombre de patientes opérées au bloc opératoire et que le nombre d’internes en gynécologie obstétrique augmente ?
Pensez-vous que les vidéos chirurgicales puissent contribuer à votre formation ?
De haut en bas:
– Je ne sais pas
– Non
– Oui, en marge des autres modalités d’enseignement
– Oui, à égalité avec les autres modalités d’enseignement
– Oui, de manière majeure et pourrait supplanter le reste
L’objectif de cette étude était d’évaluer comment le parcours de formation chirurgicale des internes pouvait être amélioré par l’apport de vidéos chirurgicales. Elle comprenait deux volets : le premier consistait en une enquête soumise aux internes du D.E.S. de Gynécologie-Obstétrique d’Ile de France tandis que le second évaluait le bénéfice potentiel d’un visionnage « accompagné » de vidéos chirurgicales sur la préparation chirurgicale.
Matériel et méthodes
Un questionnaire a été soumis aux internes de Gynécologie-Obstétrique de la région Ile de France de différents hôpitaux. Ce questionnaire se présentait au format Google Forms et comportait 9 questions à réponses multiples qui incluaient le semestre d’internat en cours, l’utilisation par l’interne de vidéos pour se former à la chirurgie et les attentes vis-à-vis des vidéos chirurgicales au cours de leurs parcours.
Une cohorte d’internes de gynécologie obstétrique de l’hôpital Tenon a ensuite été conviée à regarder des vidéos d’interventions qu’ils devraient être à même de pratiquer de manière autonome en début de post – internat. Chaque interne bénéficiait d’une séance individuelle d’évaluation. Avant leur premier visionnage, ils devaient répondre à un questionnaire pour évaluer leur degré d’avancement dans la formation et le degré de confiance dans leur capacité à réaliser ledit geste de manière autonome. Ils ont ensuite visionné ces vidéos seuls et devaient retracer par écrit les différents temps chirurgicaux mais également la technique opératoire nécessaire pour mener l’opération à bien. Ensuite, un senior (Dr Yohann Dabi) visionnait cette même vidéo avec eux en détaillant et explicitant chacun des gestes effectués, en identifiant les différentes structures anatomiques impliqués et les rapports entre organes : c’est le visionnage « accompagné ». Il s’appuyait également sur un livre d’anatomie pour reprendre les repères anatomiques opératoires indispensables. Il leur demandait alors d’évaluer le bénéfice éventuel de cette séance. Les réponses étaient qualitatives du fait du faible nombre d’internes impliqués (4 internes).
Résultats
Quelles sont les attentes des internes de Gynécologie-obstrétrique en matière de vidéos chirurgicales ?
Trente internes ont répondu au questionnaire Google Forms dont une majorité d’internes en dernière année d’internat entre le 8ème et le 10ème semestre (24/30, 80%).
A la question « Avez-vous reçu au cours de votre D.E.S. une formation « chirurgicale » sur la manière de réaliser les interventions ? », seuls 16% répondaient par l’affirmative. D’un autre côté, 60% ont répondu non et s’être formé « sur le tas » en regardant / aidant /assistant aux chirurgies en question. Enfin, 30% répondaient non et avoir utilisé des vidéos de chirurgies à visée pédagogique.
Avez-vous reçu au cours de votre D.E.S. une formation “chirurgicale” sur la manière de réalisation des interventions?
De haut en bas:
– Je ne sais pas
– Non, j’ai appris “sur le tas” en assistant aux interventions
– Non, mais j’ai reçu des cours au sein des différents services
– Non, j’ai appris par moi-même en regardant des vidéos
– Oui
La moitié des internes interrogés estimait que l’utilisation de vidéos chirurgicales pouvait contribuer à égale importance à leur formation chirurgicale avec les cours théoriques déjà dispensés et près d’un interne sur 4 pensait que ces vidéos pourraient supplanter les cours théoriques.
Les internes estimaient que les vidéos chirurgicales pouvaient contribuer à leur formation en améliorant leurs connaissances des temps clefs (96%), de l’anatomie (83%) et des gestes à faire / prohiber (86%). Ils visionnaient déjà par eux même des vidéos au moins une fois par mois dans la moitié des cas. Dans ce cas, les vidéos concernaient essentiellement des chirurgies complexes ou par voie coelioscopique / robotique (respectivement 66 et 56%). Enfin, un interne sur deux déclarait ne pas trouver facilement de vidéos de qualité pour la chirurgie coelioscopique / robotique et ce taux était même de 90% concernant la chirurgie ouverte (laparotomies ou chirurgie vulvo vaginale) (Future 4).
Apport du visionnage “accompagné” de vidéos chirurgicales
Le tableau ci-dessous résume l’état d’avancement des internes de leur formation et leur auto – évaluation avant la séance de leur capacité à réaliser l’intervention.
|
Interne 1 |
Interne 2 |
Interne 3 |
Interne 4 |
Combien de fois avez-vous pratiqué vous – même cette intervention en totalité ? |
10 – 20 fois |
< 3 fois |
Jamais |
3 – 10 fois |
Pensez – vous connaître les temps clefs chirurgicaux ? |
Complètement |
Complètement |
Partiellement |
Complètement |
Pensez – vous maîtriser cette intervention ? (Entre 1 « pas du tout » et 10 « à la perfection ») |
6 |
6 |
5 |
4 |
Vous sentiriez vous capable d’effectuer seul cette intervention (aidé par un autre interne par exemple) ? (Entre 1 « pas du tout » et 10 « à la perfection ») |
7 |
4 |
3 |
5 |
Après avoir visionné la vidéo, les internes détaillaient par écrit les différents temps opératoires. L’interne 3 a estimé que cela permettait de se resituer les rapports anatomiques » tandis que pour l’interne 4 cela lui a permis de « réaliser que certains temps pourtant importants sont méconnus ». L’interne 1 a estimé que cela constituait « un bon exercice » et l’interne 2 n’a rien appris de particulier.
L’exercice de visionnage accompagné durait ensuite environ 1h30 par interne.
A la question « qu’avez-vous pensé du visionnage accompagné » par rapport au visionnage seul, les réponses étaient les suivantes :
Interne 1 : le visionnage accompagné « permet de reprendre les temps chirurgicaux, l’anatomie, apprendre à reconnaître l’exposition nécessaire au geste et comment se faire aider, comprendre la réaction à adopter en cas de difficulté », plus efficacement que seul.
Interne 2 : « C’est surtout le commentaire qui apporte un vrai bénéfice à la vidéo. Anatomie, compréhension de la stratégie chirurgicale et compréhension du déroulé opératoire (ordre des temps clefs) sont mieux compris ». Elle se sentait plus à l’aise à l’idée de pratiquer cette chirurgie après la séance.
Interne 3 : « Prise de conscience de l’importance des espaces anatomiques et des rapports des structures entre elles / Clarification des temps chirurgicaux / Prendre le temps alors que sur la vidéo certains gestes ne sont pas explicités et donc on ne voit pas qu’ils sont réalisés ».
Interne 4 : « Reprendre les temps opératoires plus en détails, permets de revoir l’anatomie »
Les internes évalués étaient tous favorable à réitérer l’expérience et était satisfaits de l’expérience. Ils pensaient tous que des séances similaires régulières pourraient grandement être bénéfiques pour leur formation.
Conclusion
Le corps enseignant doit se réinventer pour offrir à la nouvelle génération de futurs chirurgiens une offre de formation adaptée à ses attentes et pertinente eu égard à ses caractéristiques générationnelles. L’apport des vidéos chirurgicales peut contribuer à leur formation pratique et c’est aux chirurgiens seniors de leur fournir les supports de qualité qu’ils ne trouvent pas facilement actuellement sur les plateformes disponibles. Enfin, le visionnage accompagné de vidéos serait du temps intelligemment investi par les enseignants pour préparer au mieux les internes à la réalité technique chirurgicale.
Article rédigé par Camille Mimoun, à partir d’un travail de Yohann Dabi.
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